jeudi 10 juin 2010

L'échiquier politique du Québec

Les partis politiques occupent un espace idéologique qu'on nomme l'échiquier politique. En Occident, les partis occupent généralement un axe allant de la gauche à la droite. En général, le spectre politique est composé de deux axes, l'axe économique (plus ou moins d'interventionnisme de l'État) et l'axe social (plus ou moins de libertés individuelles, comme l'avortement, l'euthanasie et la peine de mort). Par exemple, le Parti républicain aux États-Unis se situe à droite sur les deux axes, tandis que le Nouveau parti démocratique au Canada se situe à gauche sur les deux axes.

Il est à noter que la droite sociale tend à disparaître dans un certain nombre de sociétés démocratiques et développées. Ce qui la représente est la peine de mort, les restrictions sur l'avortement, la libre circulation des armes à feux, l'omniprésence de la religion, etc. Au Canada, il y a des traces de la droite sociale au sein du Parti conservateur, qui comprend quelques militants pro-vie parmi les députés, tandis qu'au Québec, il n'y a pas vraiment de parti qui l'incarne, du moins ouvertement.

À cause de la situation particulière du Québec au sein du Canada, le principal axe qui a déterminé les débats politiques au Québec depuis les années 70 est la constitution (souveraineté versus fédéralisme). Mais à partir de la fin des années 90, avec l'émergence de l'ADQ et quelques années plus tard de Québec Solidaire, le débat gauche-droite s'est animé. Par exemple, Jean Charest s'est fait élire en promettant une réingénierie de l'État en 2003 et un accès accru à la sous-traitance, des thématiques appartenant typiquement à la droite. Même le PQ, un parti traditionnellement social-démocrate, a connu ce débat il y a quelques années avec les Lucides, groupe formé notamment par les anciens péquistes Lucien Bouchard et Joseph Facal.

Récemment, le PQ a évincé son club politique d'extrême-gauche le SPQ-Libre (Syndicalistes et progressistes pour un Québec libre). De plus, Pauline Marois a lancé dans son dernier colloque un chantier sur la modernisation de la sociale-démocratie, la création de richesse et l'économie, des thématiques encore une fois relevant de la droite, mais elle a essuyé une rebuffade de ses militants et même de ses députés.

Avec la possible disparition de l'ADQ, le PLQ et le PQ sont donc tentés de "redroitiser" leurs discours, mais le PQ est confronté par la montée de Québec solidaire, vrai parti de gauche, et le PLQ semble plutôt à l'aise dans l'immobilisme et l'inaction. En fait, la droite et la gauche sont divisés au Québec, principalement à cause de l'axe souverainisme-fédéralisme, qui occupe une grande place dans les médias et le débat public.

Résultat : les Québécois auront probablement le choix aux prochaines élections entre le PLQ, un parti aux prises avec des allégations de corruption et un parti qui incarne l'inaction, et entre le PQ, un parti qui doit évoquer régulièrement le spectre d'un référendum pour ne pas perdre sa base militante, et qui incarne le modèle québécois bureaucratique inefficace.

Les forces de l'immobilisme sont donc multiples au Québec : en plus de l'axe souverainisme-fédéralisme qui divise la gauche et la droite, il y a les syndicats, les groupes communautaires et environnementalistes et les corporations comme le patronat et les ordres professionnels. Tous n'ont aucun avantage à une réforme en profondeur de l'État québécois et à une baisse de la taxation, car ils tirent leur avantage de l'appauvrissement de la classe moyenne.

Pendant ce temps, la dette québécoise continue d'augmenter (elle vient tout juste de passer à 220 milliards de dollars, et ça ne comprend pas la part du Québec dans la dette canadienne), le système de santé continue d'être ingérable, il n'y a pas beaucoup de marge de manoeuvre sur le plan fiscal, et il n'y a plus beaucoup d'argent pour la réfection des routes et des bâtiments. Pour se faire élire, un gouvernement doit promettre mer et monde à ses électeurs, en plus de satisfaire sa base militante, donc les dépenses gouvernementales augmentent à un rythme effréné, mais sans une amélioration des services ou de son accessibilité.

Mais les forces de l'immobilisme ne font pas immuables, il s'agit de créer un vecteur de changement puissant qui saura les déloger...

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